Une « Union » des Etats : la dimension autrefois seulement représentative

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  • Created on: 05-05-17 20:24

L’adhésion d’un Etat à l’Union Européenne

Au départ, lorsque l’on a commencél’aventure européenne, en 51 et en 57, les trois traités des 3 communautés originelles prévoyaient des conditions d’adhésion àleur communauté. Il était donc envisageable àce moment-làd’adhérer àune communautésans adhérer aux deux autres. C’était possible sur le papier, sauf que dans les fais, àpart le RU, personne n’a jamais vraiment penséàadhérer àune seul communauté. C’est avec le traitéde Maastricht qu’il a étéclairement indiquéque les règles d’adhésion aux communautés seraient unifiées, et ces règles ont pue évoluédepuis. 

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Conditions d’adhésion

Il y a plusieurs conditions d’adhésion pour devenir membre, qui ont étéposées par l’actuel article 49 du TUE (Traitésur l’Union Européenne). A l’origine, la seule condition posée pour appartenir àl’une des communautés : être un Etat européen.

Sauf qu’être un Etat européen ce n’est pas si évident que cela, puisqu’il est tout àfait possible de discuter les frontières géo politiques de l’Europe. Et on le sait, un Etat européen, au sens de l’Europe, ça comprend la Turquie par exemple…Etat européen, c’est donc une condition particulièrement floue.

Voilàpourquoi, en 1993, àCopenhague, ont étéfixés des critères (déjàmentionnés dans une leçon précédente comme étant les “critères de Copenhague”). Il y a 3 catégories de critères.

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Des trois séries de critères

Ces 3 catégories de critères sont politiques, économiques, et d’intégration.

Critère politique : un Etat européen qui veut devenir membre de l’Union doit respecter la démocratie et l’Etat de droit.

Critère économique : un Etat qui veut adhérer doit promouvoir une économie de marchéviable.

Critère d’intégration : un Etat qui veut devenir membre de l’UE doit assumer toutes les obligations, tous les objectifs, qui ont déjàétédécidés par l’UE. C’est l’intégration de “l’acquis communautaire.”

A cet égard, un Etat qui ne respecterait pas les acquis communautaires, risque, depuis le traitéd’Amsterdam, de voir son droit de vote suspendu. Depuis Copenhague, depuis Amsterdam également, ces critères ont très peu évolué.

Le traitéde Lisbonne a simplement ajoutéque parmi les critères politiques (démocratie, état de droit), il faudrait ajouter certaines valeurs comme la dignité, l’égalité, le droit des minorités.

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Des trois séries de critères

En l’état, en 2016, si un Etat veut devenir membre de l’UE, il doit respecter ces 3 critères, et parmi les critères politiques, il y a depuis Lisbonne l’intégration de ces 3 nouvelles valeurs. Le Conseil européen, les chefs d’état et de gouvernement peuvent faire évoluer ces critères, ils peuvent évoluer n’importe quand. Ils peuvent être modifiés par un autre que son créateur parce qu’ils émanent du conseil européen. Le critère le plus important aujourd’hui est le troisième critère, le critère de l’acquis communautaire. L’idée consiste à dire : c’est une évidence que vous respectez les deux premiers critères, en revanche le 3ème critère est beaucoup plus compliqué et c’est celui sur lequel les échanges se font lors des débats, cad sur la capacité d’accepter tout ce qui a déjà été fait par l’UE, et en contrepartie, sur la capacité d’absorption de l’UE. C’est à dire que pour les Etats actuels, pour les 28, il faut que tout nouvel Etat ne remette pas en cause, par son arrivée, le fonctionnement de l’UE. Elle marche, elle a une direction, et il ne faut pas que l’arrivée d’un nouvel Etat change cette direction et ce fonctionnement. D’un point de vue financier, s’il y a un élargissement, le nouvel Etat ne doit pas perturber l’équilibre économique. D’un point de vue institutionnel, les institutions en place ne doivent pas être déséquilibrées. L’objectif ici mis en avant en 2005 de la capacité d’absorption de l’UE, c’est un objectif qui concerne un pays en particulier, un pays peuplé et avec un poids économique certain : la Turquie. Son entrée viendrait-elle ou non changer l’UE au point de toucher sa capacité d’absorption ?

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Procédure d’adhésion

Deux phases : une oùce sont les institutions de l’UE qui vont agir, et une oùc’est l’Etat qui souhaite devenir membre qui va devoir agir.

Dans la première phase, un Etat signifie àl’UE, cad au conseil européen, qu’il souhaite devenir membre. Cette candidature, cad non pas l’adhésion mais seulement la candidature, doit être reçue àl’unanimitédu conseil européen. Tout Etat membre a un droit de véto sur l’entrée de ce nouveau membre ==> plus il y a de membres, plus il est difficile d’obtenir l’unanimité.

Ensuite c’est la commission qui va examiner le dossier et rendre un avis consultatif, qui ne lie personne (ce n’est qu’un avis) mais qui est obligatoire.

Suite àl’avis de la commission, c’est le Parlement, qui lui-même rend un avis, un avis conforme, qui doit être suivi. Cela veut dire que le Parlement peut s’opposer àl’entrée d’un nouveau membre, même s’il a étéacceptépar les 28 chefs d’Etat et par la commission : c’est ce qui a failli se passer en 1995 avec l’Autriche, la Finlande et la Suède. Le Parlement européen, àl’époque, sent qu’il a beaucoup moins de pouvoir que les autres institutions (conseil et commission). Puisque son avis doit être conforme, il fait comprendre aux représentants des chefs d’Etat et de gouvernement, qu'il ne dira oui que si on accepte de changer les institutions, avec une vraie réforme institutionnelle.

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Procédure d’adhésion

Le Parlement a néanmoins du s’incliner face aux pressions des Etats membres.

Le traité de Lisbonne a fait un pas de plus vers les Parlements, mais pas seulement le parlement européen, vers les Parlements nationaux également. En effet, depuis, chaque nouvelle candidature, après avoir reçu l’avis du conseil et de la commission et du parlement européen, chaque parlement national de chaque Etat qui doit dire oui ou non à l’entrée d’un nouveau membre.

En France, c’est la révision constitutionnelle de 2008 qui nous précise qu’en cas d’arrivée d’un nouveau membre, cette arrivée devra être approuvée soit par référendum, soit par le Congrès.

Dans l’hypothèse de la Turquie, il ne suffira donc pas que le chef d’état ou de gouvernement dise oui, il faudra un accord des parlementaires réunis en congrès ou un accord du peuple. 

Suite à cette phase, il y a la deuxième phase, où ce sont les Etats membres et l’Etat qui veut devenir membre, qui vont négocier les conditions d’adhésion. Une fois cette négociation faite, l’Etat candidat signe un traité avec tous les membres. Ce traité prévoit toutes les conséquences de l’adhésion (combien de représentants au parlement, à la commission, au conseil, s'il faut prévoir une période de transition, s’il y aura des dérogations, etc…)

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Une Union à géométrie(s) variable(s) ?

L’Union telle qu’elle se construit, parce que c’est une union pragmatique, prend en compte le fait que sur certains points, certains  Etats vont aller plus loin, et que sur d’autres, certains Etats seront en retrait. Il y aura invariablement une Europe àgéométrie variable, àplusieurs vitesses. Dés l’origine, les traités de Rome avaient prévu des mesures dérogatoires, mais ces mesures prévues dans les années 50 étaient temporaires, et permettaient àcertains Etats de ne pas appliquer la politique communautaire : ce n’était que des exceptions temporaires, appelées “clauses de sauvegarde”

Aujourd’hui, ces clauses temporaires ont ététransformées en clauses pérennes. Elles ont un caractère durable.

On a réalisécette nécessitéavec la mise en place de la zone Euro, on s’est rendu compte que tous les Etats n’en voulaient pas, c’’est la raison pour laquelle on a créédes clauses d’exemptions, appelées aussi clauses “opting out”.

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Les Etats en retrait : les clauses d’exemptions (o

C’est une dérogation au traité qu’on va accorder à un Etat. cette dérogation a un but simple : éviter un blocage. 3 exemples :

-    La zone Euro : politique prévue à partir de 1999, et qui aujourd’hui compte 19 des 28 Etats de l’UE. Le RU n’a pas souhaité y participer, le Danemark non plus. Certains pays n’y rentrent pas parce qu’ils ne peuvent pas, d’autres parce qu’ils ne veulent pas. En effet, pour faire partie de la zone € il faut remplir 3 conditions économiques :
* avoir une dette inférieur à 60% du PIB
* un déficit public inférieur à 3% du PIB
* avoir un taux d’inflation maîtrisée
Si ces 3 conditions sont remplies, un Etat peut rentrer dans la zone Euro. C’est le cas de la Suède. Sauf que la Suède ne veut pas y entrer. - L’espace Schengen : depuis 1999, 11 pays de l’union ont décidé, avec les fameux accords de Schengen, de constituer un ensemble dans lequel les frontières physiques entre les Etats membres disparaitraient. Certains Etats non-membres de l’Union peuvent le rejoindre (la Suisse par exemple). Le Royaume Uni n’en fait pas partie, l’Irlande non plus. - La charte des droits fondamentaux : certains pays ont demandéàce que lon ne le leur applique pas dans son entièreté: Pologne, République Tchèque, RU par exemple. Il y a des clauses oùcertains Etats sont en retrait.

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Les Etats en avance : les coopérations renforcées

Une coopération renforcée, c’est un instrument qui va permettre, soit àl’extérieur des traités soit dans le cadre des traités, àquelques Etats, d’aller au-delàdes exigences communes. Au départ, c’était quelque chose de prévu par l’UE mais pas mis en avant dans les traités de manière visible, forte. Le traitéd’Amsterdam est un tournant pour cela : il a un titre entier sur les coopérations renforcées. Ces coopérations renforcées sont, de la même manière que l’opting out, une menace pour l’unitéeuropéenne. Voilàpourquoi les conditions pour une coopération renforcée sont restrictives.

Première condition : vous ne pouvez faire une coopération renforcée que dans un domaine de compétences qui n’appartient pas exclusivement àl’UE. Ce qu’on appelait autrefois le premier pilier, l’élément intégrédu droit de l’UE, doit être de la compétence du droit de l’UE, et doit être appliquéde la même manière par tous les Etats. Les Etats membres ont transféréleurs pouvoirs dans certains domaines de compétence, et du coup ils ne peuvent pas décider de modifier ou de reprendre ce pouvoir : ce qui est àl’UE reste àl’uE.

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Les Etats en avance : les coopérations renforcées

En outre, pour une coopération renforcée, il faut nécessairement contribuer à la réalisation de l’Union, la renforcer. Elle ne doit pas aller au détriment de l’UE, au contraire. Cela veut dire que l’objectif premier c’est de passer par l’UE.

C’est là encore une solution pour éviter un blocage : si l’UE ne veut pas le faire, alors certains Etats vont peut-être pouvoir l’envisager (nombre minimum : 9 Etats).

Objectif de cette coopération ne doit pas être de morceler l’union, mais simplement de l’aider.

 Autant une clause d’opting out peut être permanente, autant une coopération renforcée est nécessairement provisoire. 

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Les rares exemples de renforcement(s)

Trois exemples : -    La première coopération renforcée a étéautorisée en juillet 2010, elle concerne le divorce et la séparation de corps. En 2010 elle touchait 14 Etats, il y en a actuellement 2 de plus ==> 16 Etats ont donc une coopération renforcée en matière de divorce. 

L’objectif est pas de créer une procédure de divorce commune àces 16 Etats, mais simplement de se mettre d’accord sur la solution àappliquer lorsqu’on a un divorce international, c’est àdire impliquant deux personnes ressortissantes de deux des 16 pays concernés.

-    Autre coopération renforcée en 2011, qui met en avant 25 Etats de l’Union, (tout le monde sauf Espagne, Italie et Croatie), et pour une fois le RU en fait partie. Cela concernait les brevets. L’objectif était de créer un brevet unique, commun, dans le cas d’une invention. Ceux qui ont refusé, c’était pour des raisons linguistiques.

-    Autre exemple, datant de 2013 : coopération renforcée de gauchistes puisque c’est en matière de taxes sur les transactions financières, qui concerne 11 Etats membres : Belgique, Allemagne, Estonie, Grèce, Espagne, France, Italie, Autriche, Portugal, Slovénie, Slovaquie. Ces 11 Etats membres ont décidéd’aller plus loin dans la taxation des transactions financières (sensée entrer en vigueur en 2016). 

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L’initial « silence »

Les textes antérieurs àLisbonne ne prévoyaient pas de procédure de retrait, et ne prévoyaient pas d’arguments qui prétextaient le départ d’un des membres de l’UE. Dans le traitéde Rome de 1957, “vouloir mettre en place une Union sans cesse plus étroite”, cela sous-entend que l’on n’envisage pas la possibilitéqu’un des Etats membres se retire.

A cela vous ajoutez le fait qu’àl’exception du traitéCECA, les deux autres communautés ont étéconclues pour une durée illimitée et ,par définition, sans possibilitéqu’un membre se retire.  La Cour de justice, dans l’arrêt Costa contre Enel du 15 juillet 1946, avait d’ailleurs soulignéle fait que, lorsqu’un Etat partage un droit souverain, il consent àlimiter sa souveraineté, cette limitation est définitive, et pas temporaire. En conséquence, un Etat qui rentre dans l’UE et qui partage sa souveraineté, n’est pas senséen principe pouvoir la reprendre. Les traités ne prévoyaient donc pas de possibilitéd’exclure un Etat qui par exemple ne respecterait pas ses obligations.

Si un Etat membre contrariait le traité, il pouvait être sanctionné, des recours pouvaient être faits, des prestations pouvaient être suspendues (comme le droit de vote), mais l’Etat ne pouvait être exclu.

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L'initial "silence"

Tout cela plaide en faveur de l’absence de l’impossibilité d’un droit de retrait. Et pour comprendre la question qui se pose ici, on peut regarder ce qu’il se passe à l’étranger (d’où la jurisprudence du jour : décision de la Cour Suprême du Canada du 20 août 1998). Dans cet avis, on demandait à la CS canadienne ce qu’elle pensait de l’hypothèse du départ de l’Etat fédéral d’un de Etats fédérés. La CS éclaire la situation en disant qu’à priori, quand on appartient à une union d’Etats, on ne peut pas partir comme ça, unilatéralement. On peut le vouloir, le décider, mais en revanche cet Etat, s’il veut partir, doit négocier son départ et les conditions de son départ. Les conditions de son indépendance doivent être discutées à plusieurs.

Tout ceci ne plaide à priori pas en faveur de la possibilité d’un droit de retrait. Sauf que les Etats, même s’ils partagent leur souveraineté, tant qu’ils ne sont pas dans un Etat fédéral, ils ne sont pas obligés de rester. Juridiquement, il était donc impossible de dire aux Etats membres qu’ils ne pourraient pas sortir de l’UE.

Certains Etats ont organisé des référendums (ex : en 1975 au RU, puis plus **** le Danemark) pour demander au peuple s’ils voulaient que cette possibilité existe.

Le traité de Lisbonne a officialisé l’éventualité d’un retrait.

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La prévision portugaise

Cette prévision est simple : elle s’inspire en grande partie de la jurisprudence du jour (CS canada). L’article 49 du traitéde l’UE a prévu l’adhésion, et l’article 50 en prévoit le retrait. Tout Etat membre, depuis 2007, officiellement, a la possibilitéde se retirer de l’Union Européenne.

Cette décision est unilatérale : on n’a pas besoin de l’accord des 27 autres si on souhaite sortir de l’UE, alors qu’on a besoin de l’accord des 28 si on souhaite adhérer àl’UE.

Un Etat membre de l’UE peut donc, sans aucune autre condition particulière, sortir de l’UE. Pour ce faire, le chef d’Etat ou de gouvernement notifie sa décision au conseil européen et, une fois cette décision unilatérale transmise, ce sont tous les Etats de l’UE, représentés par l’UE, qui vont négocier les modalités de retrait.

Donc une phase unilatérale, et une étape conventionnelle, négociée, multilatérale. En cas d’échec de la négociation, le retrait est automatique 2 ans après la notification au conseil européen. Cad qu’on se donne 2 ans pour trouver un accord de départ. S’il n’est pas trouvédans les 2 ans, le pays est automatiquement retiréde l’UE. 

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La dimension autrefois seulement représentative ?

Le projet européen s’est d’abord construit comme tous les projets internationaux : avec une dimension représentative. Cad qu’on coopérait, et chaque Etat avait 1 voix, et défendait ses intérêts propres. Et petit àpetit, cette dimension uniquement représentative s’est mue vers une dimension intégrative, dimension dans laquelle chaque Etat accepte de confier des compétences àl’UE, et oùc’est cette-dernière (l’UE) qui décide, et non plus l’Etat. L’Union devient donc plus qu’une union des Etats, elle devient une union des peuples, et si cette union des peuples se réalise, on va nécessairement toucher àun critère, nédans le lieu du jour (Athènes), le critère démocratique.

Ce lien entre démocratie et UE a étéportéprincipalement dans l’acte unique européen, dont on sait très bien qu’il a étéconçu par DeLaure mais aussi Mitterand, àqui l’on doit la règle d’Or du jour : “Je ne me défais pas cependant de l’idée qu’une sociéténe survit que par ses institutions. Ainsi en sera-t-il de l’Europe”

Une sociétésurvit grâce et par ses institutions, voilàpourquoi le droit institutionnel de l’UE n’est pas que descriptif, il est aussi politique, il touche au coeur de l’UE elle-même.

Maurice Hauriou a appuyécela en disant que les institutions sont le coeur de la République.

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